Vivez une journée de navigation avec l’équipe
01 Mai 2024
Un nouveau chapitre de l’aventure SP80 a commencé il y a quelques mois avec les premières navigations de notre bateau pour le record du monde. L’équipe passe désormais beaucoup de temps à Leucate, dans le sud de la France, pour naviguer dès que les conditions le permettent et apprendre le plus possible sur l’eau.
Notre bateau est une machine unique qui demande une grande logistique avant, pendant et après chaque run :
Comment se passent nos journées sur l’eau ? Combien de temps nous prend la mise en place pour un run ? Combien de runs arrivons-nous à faire par sortie ? On vous raconte tout en détails !
J-1, les derniers préparatifs
Avant de sortir sur l’eau, il faut que toutes les conditions soient réunies. L’équipe suit en permanence tous les relevés et prévisions météorologiques et prend sa décision finale quelques heures avant le jour J : si de la Tramontane stable entre 20 et 40 nœuds est annoncée pour le lendemain, la sortie est validée et l’équipe met le réveil aux aurores !
Afin de maximiser le temps passé sur l’eau, le bateau est déjà préparé en amont pour assurer une mise à l’eau rapide le jour J : les trappes de visite sont fermées, le matériel de sécurité (casque, harnais, bouteille d’air) est remis dans le cockpit, les caméras sont nettoyées, les systèmes sont tous vérifiés et sécurisés afin qu’ils ne bougent pas pendant la navigation, le fonctionnement des différents capteurs est validé pour assurer l’enregistrement des données de navigation, etc. L’équipe kite, de son côté, prépare les ailes qui seront utilisées (entre 20m2 et 50m2) ainsi que plusieurs sets de lignes (entre 40m et 70m de long) pour pouvoir lancer l’aile plusieurs fois au cours d’une session.
Jour J, 8h au port
Le jour se lève à peine et tout le monde s’active déjà autour du bateau. Certains chargent le matériel nécessaire sur les bateaux moteurs (ou « chase boat ») pendant que d’autres effectuent les tout derniers préparatifs sur le bateau. En quelques minutes, le bateau est emmené jusqu’à la mise à l’eau et doucement descendu le long de la cale. Puis, les pilotes montent à bord, les verrières sont fermées et tout le monde allume son casque pour assurer une communication continue entre les équipes pendant la journée. Le départ est donné !
Nous avons la chance d’avoir le soutien BMW Suisse qui nous permet d’assurer nos trajets entre la Suisse et la France mais aussi les déplacements du bateau sur le port !
9h, la sortie du port
Le bateau ne peut pas sortir du port tout seul : nos deux chase boats doivent le guider pour manœuvrer sans encombre jusqu’à la mer à basse vitesse. Puis le convoi accélère et parcours une dizaine de milles nautiques pour s’arrêter le long de la plage des Coussoules. Sur les chase boats, chaque équipe à un rôle bien défini : Chase 1 s’occupe du bateau du record, et Chase 2 gère tout ce qui concerne le kite.
10h, Le set-up
Chase 1 jette l’ancre et amarre solidement le bateau du record en position d’attente afin de pouvoir préparer le lancement du kite. Une fois le bateau immobilisé, Chase 2 s’approche, s’attache au bateau du record, gonfle l’aile et se prépare à connecter les lignes du kite au bateau. C’est également un moment de discussion entre tous les bateaux et on réévalue les conditions : est-ce que le vent est déjà bien établi ? Est-il plus fort qu’annoncé ? Moins fort ? On se met d’accord sur les longueurs de lignes à utiliser, ce qui peut avoir beaucoup d’importance sur le run. En fait, plus elles sont longues, plus notre pilote Benoît peut « jouer » avec le kite : en effectuant des mouvements dans les airs, il augmente la vitesse de déplacement du kite dans l’air et donc la force générée par le kite, ce qui fait accélérer le bateau. En revanche, avoir plus de lignes signifie également avoir un peu plus de traînée, ce qui diminue la performance générale du bateau : il faut donc trouver le bon compromis !
Pendant cette étape, Chase 2 est attaché au bateau du record, qui est attaché au Chase 1, qui est au mouillage !
Une fois que tout est prêt pour le lancement du kite, Chase 2 se détache et commence à dérouler les lignes en s’éloignant petit-à-petit de notre bateau.
11h, le premier run en détails
Chase 2 s’éloigne doucement jusqu’à se retrouver en bord de fenêtre (c’est-à-dire à l’endroit propice au décollage du kite par rapport au vent). Petit-à-petit, le bateau du record, toujours ancré au Chase 1, commence à se faire entraîner par le kite et va pivoter pour se mettre face au vent. Lorsque les pilotes confirment qu’ils sont prêts, Chase 2 profite d’une risée pour faire prendre un peu plus de vent au kite. 3, 2, 1….le kite décolle !
À bord, Benoît prend le relais et s’assure qu’il contrôle bien le kite. Puis, il donne le top au Chase 1 pour qu’il largue le bateau. Cette étape se fait en deux temps : on fait d’abord pivoter à nouveau le bateau pour qu’il soit dans le bon axe pour le départ du run (travers au vent). Puis, la dernière amarre qui retient notre fusée est larguée et elle peut enfin accélérer !
Pendant le run, les deux chase boat suivent le bateau pour pouvoir aider rapidement les pilotes en cas de besoin. Il sont aussi concentrés sur les éventuels obstacles sur le passage, la distance à la plage et la profondeur. Ils communiquent en tout temps avec les pilotes pour leur donner des observations extérieures: est-ce qu’ils se rapprochent trop de la plage ou d’une zone peu profonde et risquent d’endommager le foil? En cas de doute, la décision est prise de stopper le run et les pilotes peuvent larguer le kite pour s’arrêter très rapidement.
Une fois le run terminé, Benoit redescend le kite en bord de fenêtre et le largue à proximité de Chase 2 qui a pour seule mission de le récupérer. Il faut être rapide et précis pour éviter que le kite s’envole ou que les lignes s’emmêlent dans les appendices (foil et safran). Pour aider à la manœuvre, Chase 1 récupère immédiatement le bateau afin de l’empêcher de dériver.
Une fois le kite et le bateau sécurisés, Chase 1 tracte à nouveau le bateau jusqu’au départ du run, se rattache à l’ancre et remet le bateau en position d’attente (i.e. le « Set up »). Pendant ce temps, Chase 2 prépare l’aile pour un nouveau décollage avec un nouveau set de lignes. Pour éviter les noeuds dans les lignes et ne pas perdre de temps, nous ne réutilisons jamais deux fois le même set de lignes lors d’une sortie : c’est pour cette raison que nous partons avec beaucoup de sets prêts le matin ! Toutes les lignes utilisées au cours de la journée seront démêlées en fin de journée.
12h, les runs s’enchaînent
Pendant ces manipulations, l’équipe échange quelques informations importantes avec les pilotes, comme la vitesse maximale atteinte pendant le run, les valeurs mesurées par les capteurs de forces ou de mouvement à bord, ce que les pilotes ont ressentis, ce qu’ils voudraient faire pour le prochain test, etc. Puis, Chase 2 revient connecter le kite avec un nouveau set de ligne, et c’est reparti ! Les runs s’enchaînent ainsi jusqu’à ce que les conditions ne permettent plus de naviguer (baisse du vent, plus de set de lignes disponibles, nuit qui tombe, etc). En moyenne, l’équipe réalise 5 runs au cours d’une journée sur l’eau.
17h, retour au port
Lorsque la décision de rentrer est prise, l’ancre est relevée et Chase 1 tracte le bateau jusqu’au port. Il est ensuite rapidement sorti de l’eau, mais la journée est loin d’être terminée ! Il faut rincer le bateau, ses composants électroniques et mécaniques, tout sécher et contrôler les systèmes post-navigation. Il faut aussi étaler les centaines de mètres de lignes utilisées dans la journée pour les démêler et les replier précisément pour leur prochaine utilisation. Les ailes de kite sont également contrôlées et mise à sécher.
18h, Le debrief
Il faut maintenant débriefer la session en détails : de la mise à l’eau jusqu’au dernier run, nous repassons sur toutes les procédures et analysons ce qui a bien marché, ce qui a moins marché, ce qui a pris trop de temps, comment l’équipe peut s’améliorer sur la logistique, comment les pilotes peuvent s’améliorer sur leurs runs, etc. C’est un moment capital car chaque étape effectuée pour la première fois avec le bateau est également une première pour l’équipe. Tout est à inventer car notre bateau est unique ! Il faut se former et s’entraîner, aussi bien à piloter le bateau qu’à être performant sur toute la logistique autour d’un run.
Tout est consciencieusement noté, les tâches sont distribuées pour améliorer le bateau ou la logistique des runs avant la prochaine navigation, et la vitesse maximale atteinte est affichée sur le tableau des vitesses sur le mur du bureau.
Enfin, il est temps de rentrer pour récupérer des émotions de la journée et revenir toujours plus motivé au bureau le lendemain, avec en tête, déjà, la prochaine session de navigation !
© Photos de l’article: Guillaume Fischer
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